Les dieux dans les vases grecs
Les vases grecs de la collection du duc de Luynes, donnée à la Bibliothèque nationale en 1862, offrent de nombreuses images relatives à la mythologie. La majorité de ces céramiques aux formes diverses, utilisées pour servir et boire le vin au banquet, contenir des huiles parfumées pour la toilette, ou honorer les dieux et les morts, ont été produites à Athènes aux 6e-4e siècles av JC. Le panthéon grec n’a jamais été figé : si les principaux dieux olympiens sont connus par de nombreux textes, temples et représentations figurées, leurs aventures ont varié selon les régions et selon les époques. Les images nous offrent donc, souvent, des aperçus uniques pour nous des dieux et déesses de l’Antiquité classique.
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Zeus, maître des dieux
Dieu du ciel, garant de l’ordre et de la justice divine et humaine, Zeus est le premier des dieux. Fils du titan Cronos et de Rhéa, il a conquis sa place contre son père. Ce dernier, de peur d’être détrôné, mangeait ses enfants au fur et à mesure de leurs naissances. Quand son sixième enfant naquit, sa mère le dissimula et présenta une pierre emmaillotée à Cronos qui l’avala. Devenu adulte, avec l’aide de Métis, Zeus lui fit cracher ses frères et sœurs, et tous ensemble ils luttèrent contre les Titans. Il obtint également l’aide des Cyclopes en les délivrant du Tartare ; en remerciement ces derniers lui offrirent la foudre et le tonnerre forgés dans les profondeurs de la Terre. Après une lutte sans merci, Zeus bannit les Titans du ciel.
Sur la panse de ce grand lécythe apparaît Zeus avec ses deux attributs, le foudre dont le feu est indiqué en rouge et le sceptre qui marque son autorité sur les dieux comme sur les hommes. Sa pose majestueuse, le corps nu tendu en avant, traduit sa puissance. Mais la petite figure de l’épaule, une femme courant en regardant derrière son épaule, complète l’image qui n’est plus simplement la représentation du dieu au foudre, mais une scène où il est à la poursuite d’une de ses nombreuses conquêtes amoureuses, peut-être la nymphe Égine.
© Bibliothèque nationale de France / CNRS - Maison Archéologie & Ethnologie René Ginouvès
Assemblée des dieux : Hermès, Athéna, Zeus, Héra, Arès
Après sa victoire, Zeus s’installe sur l’Olympe avec ses frères et sœurs, dont Héra qu’il épouse et qui devient la déesse du mariage et du foyer. Leur fils est Arès, dieu de la guerre et de la destruction. Mais Zeus a aussi de nombreux autres enfants, certains divins : il est le père d’Hermès (avec la nymphe Maia), le messager des dieux. Et c’est tout seul qu’il enfante Athéna, déesse de la sagesse : un oracle lui ayant prédit qu’il serait détrôné par la naissance de l’enfant de Métis, la Sagesse, il l’avala tout entière, et au moment de la délivrance, Athéna sortit toute casquée de la tête de son père.
La face principale de cette amphore présente une assemblée des dieux : au centre, assis sur un siège cubique apparaît Zeus au foudre et au long sceptre. Nu, à l’exception d’un manteau enroulé autour de ses jambes, il regarde derrière lui sa fille Athéna, qui se distingue par son équipement guerrier : le casque, la lance, et l’égide, cette peau de chèvre bordée de serpents impossible à percer. Devant lui se tient Héra, un manteau retombant sur l’épaule droite. Deux autres divinités encadrent le groupe : à gauche arrive Hermès, avec un chapeau de voyageur (le pétase), des bottes ailées et le caducée, le bâton des hérauts. Enfin, tout à droite est assis Arès. Il porte un casque corinthien et tient une très longue lance. Chaque divinité, pourtant aisément reconnaissable à ses attributs, est nommée par une inscription. Les gestes et les jeux de regards suggèrent ici une conversation complexe : les deux déesses semblent s’adresser l’une à l’autre en faisant de grands gestes, tandis que Zeus tourne la tête pour accueillir Hermès qui s’adresse à lui. La présence d’Arès indique peut-être une scène liée à la guerre de Troie, à laquelle les dieux participent, chacun soutenant l’un ou l’autre camp.
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Héra et Prométhée
Prométhée, fils du Titan Japet, s’est à plusieurs reprises opposé à Zeus pour venir en aide aux humains. Une première fois, il a dupé le dieu lorsqu’a été décidé comment effectuer le partage du sacrifice entre les dieux et les hommes. Il a proposé à Zeus de choisir entre deux parts d’un bœuf : d’un côté, les chairs et entrailles cachées sous la peau, et de l’autre les os recouverts de graisse blanche ; le dieu a choisi la seconde, laissant la viande aux humains. Zeus décida pour se venger de priver les hommes du feu ; Prométhée le vola alors pour eux. Sa punition pour ces offenses fut terrible : il fut enchaîné à un rocher et un aigle lui dévorait chaque jour le foie, qui repoussait chaque nuit. Finalement, après plusieurs générations, Zeus envoya Héraclès le délivrer, et l’accueillit sur l’Olympe.
Le médaillon central de cette belle coupe met en scène dans un cercle de méandres une représentation unique, Héra accueillant Prométhée sur l’Olympe. La déesse trône à gauche, un voile sur les cheveux. Elle tient un grand sceptre d’où partent des volutes, tandis qu’elle accueille avec une phiale à libation Prométhée qui monte vers elle. Il est couronné et s’appuie à un long sceptre ; cette couronne est sans doute une substitution de ses chaînes : comme Zeus avait juré qu’il ne serait jamais délivré, il dut porter, selon les versions, un anneau ou une couronne qui le liait toujours à un morceau du rocher.
© Bibliothèque nationale de France
La gigantomachie
Après leur victoire sur les Titans, les dieux olympiens durent lutter contre d’autres ennemis redoutables, les Géants, fils de la Terre, Gaia. Tous participent à cette lutte, aidés par le héros Héraclès. Ce thème revient de manière récurrente dans l’art grec, symbole de la victoire de la civilisation contre le chaos et la barbarie.
Cette coupe présente une succession de duels entre un dieu et un géant ; sur cette face, Poséidon domine de toute sa hauteur son ennemi à terre qu’il attaque de son trident et du rocher Nisyros qu’il lui lance dessus. Le Géant Polybotès, blessé, se réfugie inutilement derrière un grand bouclier orné d’un épisème en forme de canthare.
Sur le rocher, des animaux aux silhouettes effacées – un serpent, un scorpion, une tortue et un lapin - suggèrent sa taille, une véritable île détachée de Cos d’un coup de trident. De part et d’autre, Héphaïstos casqué et cuirassé enfonce ses tenailles brûlantes dans le flanc de son opposant dont les genoux se dérobent, et Hermès tenant une lance et un arc terrasse un ennemi tombant en avant, derrière son bouclier orné d’un scorpion.
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Poséidon et Thésée
Si Zeus règne sur la Terre, deux de ses frères ont eux aussi leur domaine : Hadès règne en Enfer, et Poséidon sur les Mers. De son trident qu’il brandit il ébranle la terre et provoque tremblements de terre et raz de marée. Il vit dans son palais sous-marin avec son épouse Amphitrite, mais a également eu d’autres aventures. Il s’est notamment uni à Ethra, la même nuit que le roi d’Athènes Egée : ainsi est né le héros Thésée, avec un père mortel et un père divin. Lors de son séjour en Crète, le roi Minos le mit au défi de prouver cette filiation en lançant son anneau d’or dans la mer et sommant Thésée de le lui rapporter.
Ce cratère majestueux présente la rencontre entre le dieu des mers et son fils. Poséidon trône sur un siège richement décoré, les pieds relevés sur un repose-pied orné de dauphins. Il tient son trident, tandis qu’il donne la main droite à Thésée. Derrière lui se tient sans doute Amphitrite, tendant une couronne végétale au jeune héros.
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Athéna à la tablette
Athéna, fille de Zeus et Métis, la Sagesse, est sortie tout armée du crâne de son père, et les images la représentent effectivement de cette façon, avec l’égide que lui avait offert Zeus. Il s’agit de la peau de la chèvre Amalthée, qui avait nourri Zeus enfant, réputée impossible à percer, bordée de serpents. Si Athéna est une déesse guerrière, elle tient de sa mère la raison et la ruse ; elle veille aussi sur les artisans comme les potiers. Protectrice de la cité d’Athènes à qui elle a donné son nom, elle est fréquemment représentée dans l’art attique.
Athéna se tient debout sur la face principale de cette amphore. Elle porte l’égide par-dessus sa tunique et sur sa tête un casque à cimier dont les protèges-joues sont relevés. Ses armes, lance et bouclier, sont posées à terre, tandis qu’elle est absorbée par la tablette ouverte qu’elle tient, un stylet dans l’autre main. Représentée comme un guerrier au repos, lisant ou réfléchissant à ce qu’elle veut écrire sur la tablette, Athéna incarne ici sa dualité, à la fois en armes et engagée dans une activité intellectuelle.
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La triade apollinienne
Léto est l’une des conquêtes amoureuses de Zeus. Quand elle fut enceinte, la jalouse Héra la poursuivit de sa colère, interdisant à la Terre d’accueillir la naissance à venir, et au soleil de briller là où naîtraient ses enfants. Elle trouva finalement refuge sur l’île de Délos où naquirent les jumeaux Artémis, déesse vierge de la chasse, liée à la lune, et Apollon, le dieu musicien proche du soleil, qui préside aussi aux divinations et aux guérisons.
Au centre de l’image de cette hydrie est assis Apollon, couronné de laurier, une grande cithare sur les genoux ; une peau de fauve orne son siège, et un oiseau semble s’envoler de l’instrument. Il tend une large phiale à Artémis pour qu’elle y verse une libation de sa cruche (œnochoé) ; portant son arc, deux flèches et un carquois, elle est accompagnée par une biche. A droite se tient leur mère, aux vêtements richement ornés, tenant une phiale, un long sceptre et deux branches ; à gauche arrive Hermès, que l’on reconnaît à ses vêtements et son caducée. La nature animale et végétale, très présente, participe à l’harmonie de la scène qui s’accorde avec le dieu de la musique et de la raison qui y trône.
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Apollon musicien
Apollon est le dieu du chant et de la musique, son instrument préféré est la lyre, ou sa forme plus complexe, la cithare. Il est fréquemment accompagné des Muses, ou d’autres divinités, comme Iris, dont les ailes chatoyaient de toutes les couleurs. Messagère des dieux (comme Hermès elle porte le caducée), son passage rapide dans le ciel laisse la trace de l’arc-en-ciel.
Deux hautes silhouettes occupent toute la face de ce petit vase : on reconnaît Apollon, couronné de laurier, tenant sa cithare contre lui, accompagné d’une biche. Il tend une phiale à Iris tenant une œnochoé pour effectuer une libation. Cette image empreinte de piété met à nouveau en scène le geste de libation comme hommage aux dieux. Les dieux ne se font pas à eux-mêmes une libation mais tiennent les instruments qui servent aux fidèles à les honorer, formant une sorte de modèle sacré.
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La mission de Triptolème
Parmi les sœurs de Zeus, Déméter était la déesse des moissons et de l’agriculture. Elle a eu une fille, Perséphone, qui fut enlevée par Hadès, dieu du monde souterrain, tandis qu’elle cueillait des fleurs avec ses compagnes. Inconsolable, Déméter la chercha vainement sur toute la terre, jusqu’à ce que Zeus intervienne et partage annuellement le temps de Perséphone entre quelques mois avec son mari sous terre (c’est alors l’hiver), et quelques mois avec sa mère (grâce à son retour, la croissance reprend au printemps). Pendant sa recherche, Déméter s’était arrêtée à Éleusis, où elle avait été accueillie généreusement par les habitants. En remerciement, elle y fonda un culte et leur donna l’agriculture avec pour mission pour Triptolème, le fils du roi d’Eleusis, d’aller enseigner aux hommes la culture du blé.
La scène principale de ce vase évoque le départ du héros. Déméter et sa fille se tiennent à gauche : la première tient un araire, l’instrument servant à labourer la terre, la seconde deux torches allumées, indiquant que la scène se déroule de nuit. Triptolème s’apprête ici à monter sur son char ailé, véritable trône orné d’une tête de griffon, pour aller parcourir la terre, épis et sceptre en mains.
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Apparition d’Aphrodite
Avant d’être défait par les dieux olympiens, le titan Cronos avait lui-même dû lutter contre son père Ouranos, le ciel, pour régner sur le monde. Lors de cette lutte, il le castra et de cette blessure naquit Aphrodite, la déesse de l’Amour, émergeant de l’écume de la mer (Aphros signifie l’écume), accueillie par Éros, le désir, une des forces originelles issues du chaos.
L’intérieur du médaillon de cette coupe présente Aphrodite émergeant du sol. Elle regarde Éros, représenté comme un jeune adolescent ailé, volant au-dessus du sol, qui l’accueille les bras ouverts. Aucun texte ne mentionne cette anodos (terme qui désigne l’émergence de certaines divinités) terrestre et non maritime, que l’on retrouve dans l’art à partir du milieu du 5e siècle et plus fréquemment au 4e siècle av J.-C. Elle insiste sur l’aspect chtonien, lié au monde souterrain, de la déesse de l’Amour, mais aussi du renouveau de la nature et de la végétation.
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Le jugement de Pâris
Lors des noces de Thétis et Pélée, Eris, la déesse de la discorde, n’avait pas été invitée. Elle lance alors une pomme d’or au milieu des déesses en la destinant à la plus belle. Héra, Athéna, Aphrodite : chacune revendique le titre, et comme aucun dieu ne veut s’aventurer à prendre position, on décide de s’en remettre au jugement d’un jeune prince troyen, Pâris. Héra lui promet le pouvoir, Athéna la victoire à la guerre, tandis qu’Aphrodite lui destine la plus belle femme du monde. C’est cette dernière qui gagne, et Pâris enlève Hélène, femme du roi Ménélas, entraînant le plus célèbre conflit du passé mythique.
Sur une des faces de ce grand cratère en calice, la scène se déroule autour de Pâris, assis sur les rochers en compagnie de son chien, en tenue de chasseur, un bonnet phrygien ou un casque orné de griffons sur la tête. Hermès, debout devant lui, casque et bottes ailés, le désigne de son caducée pour être l’arbitre qui décidera qui est la plus belle des déesses qui sont représentées de part et d’autre, en train de se préparer. A gauche Héra, richement parée, se regarde dans un miroir, et, Athéna, qui a laissé son casque et son bouclier orné du gorgonéion, est à la toilette devant une fontaine. L’édicule aux colonnes ioniques, dont l’eau sort par deux têtes de lion, est orné de plaques peintes et de figurines posées au sol. A droite, Aphrodite est assise juste derrière le prince qui la choisira. Elle ramène son voile, un lapin sur ses genoux, Éros lui tenant la main. Sous eux, une biche vient brouter une herbe.
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Hermès à la poursuite de Ganymède
Hermès, fils de Zeus et de la nymphe Maia, est un dieu messager ; pour cela, il porte des bottes ailées, un chapeau de voyageur à larges bords, le pétase, et tient le caducée, le bâton des hérauts. Dieu des voyageurs et du commerce, il veille aussi sur les voleurs. Il agit fréquemment pour le compte de Zeus ; c’est aussi lui qui inventa la lyre en attachant des cordes à une carapace de tortue, avant de la donner à son frère Apollon.
Sur cette petite amphore, Hermès est reconnaissable à ses bottes ailées et au caducée, un manteau drapé volant sur sa tunique courte. Il se précipite sur un jeune homme tenant une lyre : il s’agit du jeune prince troyen Ganymède, dont Zeus s’était épris. Hermès intervient ici pour l’emmener sur l’Olympe où il servira comme échanson, versant l’ambroisie dans la coupe des dieux. La carapace de tortue de la lyre, comme le plectre attaché à la caisse, sont ici très détaillés.
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Naissance de Dionysos
Le dieu Dionysos apparaît sur nombre de vases attiques, et occupe une large place dans les vases de la collection de Luynes. Cette divinité complexe est liée à de nombreux mythes, souvent marqués par le drame et la violence, à commencer par celui même de sa naissance. C’est en effet le seul dieu avec une mère mortelle : Sémélé. Poussée par la jalouse Héra, elle avait exigé de voir son amant Zeus dans toute sa gloire ; mais aucun mortel ne peut supporter une telle vue. Tenu par un serment, le roi des dieux s’exécute et Sémélé meurt foudroyée. Zeus récupère alors l’enfant qu’elle portait en son sein, et le met dans sa cuisse, d’où il naît ensuite une deuxième fois.
C’est cette naissance qui est ici évoquée. Sur les genoux de Zeus, trônant avec le sceptre et le foudre, Dionysos tient deux torches allumées ; son nom est indiqué : Diosphos, qui signifie fils de Zeus ou lumière de Zeus. Il s’agit là d’une façon tout à fait unique de désigner Dionysos, qui insiste sur le fait qu’il fut engendré par le seul dieu, ou souligne un lien spécial avec le feu. Le troisième personnage est Héra, elle aussi nommée, la main tendue devant le jeune dieu, cause de cette double naissance mais aussi présence menaçante qui le poursuivra longtemps de sa vindicte.
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Zeus donne l’enfant Dionysos à ses nourrices
La jalousie d’Héra poursuit Dionysos au-delà de sa naissance, et Zeus dut alors le cacher pour qu’il grandisse en sûreté. Selon certaines sources, il l’aurait d’abord confié au roi de Béotie Athamas et à sa femme Ino. Mais Héra l’ayant découvert, elle les frappa d’une folie qui leur fit tuer leurs propres enfants. Il cacha alors son fils auprès des nymphes du Mont Nysa, en Asie Mineure, qui le gardèrent dans la nature toute son enfance.
Zeus, un sceptre en main, tend sur cette hydrie l’enfant Dionysos à une femme assise sur un tabouret devant une colonne ionique qui signifie que la scène se passe à l’intérieur d’un palais. Derrière elle, une autre femme au long sceptre se retourne pour regarder la scène. Si l’identité de Zeus et Dionysos est précisée, celle des femmes est ambiguë. S’il s’agit des nymphes, la scène prend place sur l’Olympe, dans le palais de Zeus, où les nymphes seraient venues chercher l’enfant. S’il s’agit d’Ino en son palais, la femme au sceptre peut être Héra, évocation de la vengeance avec laquelle elle poursuit l’enfant et de la folie dont sera frappée Ino.
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Dionysos musicien et les satyres
Dionysos est fréquemment accompagné de satyres, ces êtres au nez camus, oreilles et longue queue chevalines, toujours prêts à tous les débordements. C’est le dieu du vin et de la fête : ses attributs sont le canthare, vase à boire le vin aux hautes anses ou les branches de lierre. La proximité avec la nature des personnages dionysiaques est symbolisée par les peaux d’animal qu’ils portent fréquemment. L’ivresse dionysiaque se déroule en musique, au son des lyres, doubles-flûtes ou crotales, des instruments de percussion ressemblant aux castagnettes.
Sur le médaillon de cette belle coupe, le dieu barbu, vêtu d’une longue tunique, a renversé la tête en arrière et chante au son de la grande lyre, le barbiton, qu’il joue de manière exceptionnelle. De part et d’autre, deux petits satyres dansent tout en jouant des crotales. Ils sont nus, et l’un porte sur les épaules une peau de panthère. L’autre brandit des rameaux de lierre qui viennent orner le fond de la coupe, le rouge des feuilles répondant aux couronnes de la même plante que tous trois portent.
Le thiase
Ménades et satyres forment le thiase, le cortège dionysiaque, qui parcourt les bois et les campagnes en joyeuse procession, se livrant aux nombreux plaisirs de la fête et du vin. Car Dionysos est aussi le dieu de l’illusion, du mouvement, et son monde fonctionne comme un miroir de celui des hommes, du banquet au cours duquel la coupe était utilisée, où les valeurs sont inversées, le satyre étant le contraire de l’idéal athénien du kalos kagathos, beau et bon.
Le dieu est figuré au centre, avançant près d’un âne, animal qui lui sert souvent de monture. Il tient un canthare aux hautes anses, et des branches de lierre qui se déploient largement. Deux satyres aux bottes thraces l’entourent ; l’un tient une outre à vin et une panthère, l’autre à la peau animale nouée autour du cou chante avec la lyre. Une ménade ferme la composition, dans une danse extatique durant laquelle elle brandit le thyrse (bâton terminé par un bouquet de lierre)et un serpent, une peau de panthère autour de la taille.
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Le retour d’Héphaïstos
Héphaïstos, le dieu forgeron, est le seul dieu olympien à ne pas être jeune et beau. Jeté de l’Olympe par sa mère Héra horrifiée de sa claudication, il s’était vengé en emprisonnant la déesse sur un trône piégé. C’est alors Dionysos, le dieu du vin, qui fut chargé, en l’enivrant, de le ramener afin qu’il délivre sa mère ; les deux dieux sont alors accueillis par les dieux olympiens.
Sur la face de cette coupe, Dionysos mène par la main Héphaïstos, dont la claudication est suggérée par la position des jambes. Vêtu comme un artisan, il tient ses outils, les tenailles et le soufflet de forge. Quatre satyres les accompagnent : le premier danse, le second porte un cratère, le vase où l’on mélangeait l’eau et le vin avant de le boire. Le troisième joue de l’aulos, la double-flûte. Enfin, celui qui mène la procession tient une outre pleine de vin, symbole des réjouissances qui entourent toujours Dionysos.
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La folie dionysiaque
À l’image du vin, Dionysos est un donc dieu ambigu, parfois dangereux, capable de déchaîner passions et violence. Les ménades qui le suivent peuvent effectivement aller jusqu’au diaspharagmos, le déchiquetage rituel d’un animal ensuite mangé cru (omophagie), symbole de la mania des fidèles du dieu, la folie destructrice qui abolit la frontière entre le divin et l’humain.
L’image est le revers de l’amphore précédente : se dévoile alors la figure la plus saisissante du cortège, une ménade, audacieusement figurée de dos, qui brandit deux moitiés d’un petit faon qu’elle vient de démembrer, au paroxysme de la danse et de la frénésie dionysiaque. Le peintre d’Achille, à qui est attribuée cette amphore, démontre ici tout son talent de dessinateur en créant une image d’une grande force et pleine de mystère.
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Dionysos et Ariane
Lors de ses errances, Dionysos s’arrête sur l’île de Naxos. C’est là qu’il découvre Ariane, la fille du roi de Crète Minos, abandonnée par Thésée. En effet, alors qu’elle l’avait aidé à vaincre le Minotaure et sortir du labyrinthe, le jeune héros la laisse sur l’île cycladique pendant son retour à Athènes. Dionysos s’en éprend, et en fait son épouse.
Sur le tableau de la panse de cette hydrie trônent Dionysos et Ariane côte à côte sur un siège ouvragé. En face d’eux arrive un quadrige dont seul les chevaux sont visibles. À côté, une ménade vêtue d’une peau de panthère sur sa tunique, couronnée de lierre, danse au son des crotales, tournant la tête vers les occupants du char. À droite, un satyre ithyphallique enlève une ménade levant la main. Les ceps de vigne que le dieu tient dans la main envahissent le champ où s’oppose le mouvement des satyres et ménades et l’hiératisme du couple divin.
BnF, Monnaies, Médailles et Antiques, Luynes. 687 – De Ridder. 257
Vendanges dionysiaques
Dionysos est un dieu proche des hommes, à qui il a fait don de la vigne et il a appris à faire le vin et à le boire. De nombreuses fêtent célébraient ce don, dont les Oschophoria, fondées par Thésée, qui se déroulaient à Athènes en automne, au moment des vendanges.
Le décor intérieur de cette coupe est organisé autour d’un Gorgonéion, le visage horrible de la Gorgone Méduse qui pouvait pétrifier d’un seul regard, mais qui ici protège du mauvais sort. Mais ce dispositif offre aussi un jeu au buveur, qui se retrouve face au visage grimaçant au fur et à mesure qu’il vide la coupe de son vin. Tout autour ménades et satyres sont joyeusement occupés à la vendange. La vigne déploie ses branches lourdes de grappes mûres sur tout le pourtour de la coupe. Sous la supervision de Dionysos, assis sur un mulet, les uns grimpent à la vigne pour rassembler les grappes dans de grands paniers, que d’autres amènent à la presse. Une ménade y monte, la jupe retroussée, pour fouler le raisin, dont le jus s’écoule dans un récipient au sol. L’atmosphère joyeuse et affairée témoigne de la joie de vivre dionysiaque.
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- Direction éditoriale
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Direction scientifique
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Édition
Pierre-Emmanuel Jouanneau, Éditions multimédias, BnF
Traitement iconographique
Gisèle Nedjar, Éditions multimédias, BnF
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