La société féodale au Moyen Âge
L’avènement des Capétiens sur le trône de France, en 987, va de pair avec de grands bouleversements au sein de la société médiévale. Le système féodal s’impose, favorisant le développement d’une société très hiérarchisée.
La mise en place du système féodal aux 11e et 12e siècles
La dissolution de l’autorité royale depuis Charlemagne, aggravée par les dernières grandes invasions (les musulmans, les Normands – hommes du Nord – et les Hongrois), accroît les pouvoirs régionaux des comtés. L’instauration de la dynastie des Capétiens, en 987, accélère le démantèlement du royaume et, à partir de 1030, le système féodal se met en place.
La seigneurie rurale, composée de centaines de châtellenies, s’approprie la puissance publique. Les seigneurs sont assujettis les uns aux autres dans une pyramide de liens de fidélité. En pratique, le vassal accepte des obligations d’obéissance et de service (aide militaire et financière) envers le seigneur qui le protège et reçoit en échange la possession héréditaire d’un fief ou d’une rente (à partir du 13e siècle).
Les trois états de la société
La société se segmente progressivement entre les "pauvres" (les désarmés, sans défense) et les "puissants" (ceux qui portent les armes). La théorie des ordines, soutenue par l’Église, vient conforter cette nouvelle répartition sociale. La société s’articule dès lors autour de trois ordres : ceux qui prient (les moines, les prêtres), ceux qui combattent (l’aristocratie, à peine 1 à 2 % de la population) et ceux qui travaillent (l’immense majorité, les paysans), selon un schéma social que l’on considère alors comme voulu par Dieu.
Dans cette vision de la société, la chevalerie devient un groupe cohérent et le chevalier acquiert un prestige d’autant plus grand que l’Église idéalise le rôle du combattant œuvrant pour instaurer la paix de Dieu. Au 12e siècle, avec l’essor des villes et du commerce, ce schéma tripartite se fait plus complexe : les artisans et surtout les marchands deviennent des acteurs essentiels de la vie médiévale ; la puissance seigneuriale s’affaiblit ; la chevalerie tend à disparaître et n’est plus, au 15e siècle, que l’occasion de beaux tournois et de magnifiques passes d’armes.
Une multitude de châteaux
Parallèlement, la noblesse se constitue en groupe fermé, regroupant aussi bien de pauvres que de puissants châtelains. Elle assume la gestion du territoire et l’administration des hommes. Le territoire est quadrillé par un maillage serré de châteaux qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours où nul ne réside sinon temporairement, pour percevoir les impôts, ou bien des "maisons fortes", résidences nobiliaires parfois à peine fortifiées. Le pays est divisé en châtellenies, regroupant chacune de 5 à 20 villages ; à leur tête se trouve un seigneur châtelain, qui rend la justice (sauf en cas de crime de sang, où seul le roi, ou ses représentants, peut légiférer). Il s’agit d’une organisation à échelle humaine. Le seigneur entretient le plus souvent avec ses paysans des relations de confiance ; il n’est pas rare qu’il devienne le parrain de petits paysans.
Dans ce cadre économique et politique, les ressources naturelles sont mises à disposition des habitants, moyennant impôts. La nature est systématiquement exploitée : les forêts sont mises en coupe, les cours d’eau canalisés sont scandés à intervalles réguliers de biefs et de moulins, le sommet des collines est surmonté de moulins à vent, le réseau routier, emprunté par d’innombrables voyageurs, marchands et pèlerins, se développe. La seigneurie banale se met en place dès le 11e siècle. Elle tire son nom du "ban", ancien pouvoir royal de commander et de punir, dont s’empare progressivement jusqu’au moindre seigneur. Ce pouvoir contraignant est caractérisé par la mainmise sur les hommes, sur l’espace et sur les moyens de production, comme en témoignent les "banalités", ces redevances exigées en échange de l’usage du pressoir, du four et du moulin. En effet, la construction et l’entretien de ces outils performants mais hors de prix sont assurés par le seigneur qui en fait payer l’usage.
Le rôle de l’église
Cette société recherche avant tout l’ordre, la sécurité et la paix. Elle abrite hommes et biens derrière les fortifications des villes et des villages, même si, inévitablement, des guerres viennent perturber l’état idéal du "bon gouvernement" que tout roi digne de ce nom cherche à assurer à ses sujets. Ce souci coïncide avec celui de l’Église qui tente, depuis les temps carolingiens, de brider la violence des guerriers et d’instaurer une morale militaire qui protège les femmes, les enfants et les outils de travail. À ce maillage laïque, à la fois économique et politique, s’ajoute celui de l’Église qui, vers les 11e-12e siècles, achève d’instaurer le système des paroisses en proposant aux fidèles ses églises, ses fonts baptismaux et ses cimetières. Chapelles, croix de carrefours, croix de chemins ponctuent le paysage. La religion imprègne toute la vie publique ou privée, des nobles aux pauvres gens. La prière s’impose jusque dans les actes les plus humbles de la vie quotidienne. La vie est rythmée par la cloche de l’église. En ville, elle le sera bientôt par celle des beffrois quand le "temps des marchands" (J. Le Goff) viendra se surimposer au temps divin.