Un modèle pas si transparent
Première maison construite avec des briques de verre, la réalisation de Pierre Chareau est pourtant loin d’être ouverte à tous les regards. Elle est malgré cela devenue l’un des symboles d’une architecture de la transparence.
La lumière, pas les regards
Le verre, dans la maison, est un matériau qui laisse passer la lumière, mais pas les regards. Ainsi, la façade sur cour, faite uniquement de briques translucides, ne comporte aucune ouverture. Au visiteur qui la découvre, elle se présente comme un mur opaque. La nuit, l’éclairage de la façade par des projecteurs extérieurs apporte de la lumière dans les pièces de la maison, mais empêche aussi que les voisins n’aperçoivent les ombres des habitants.
Plus qu’elle n’ouvre sur l’extérieur, la brique de verre isole ici la maison et ses habitants.
Une maison dans l’air du temps
À la fin de la Première Guerre mondiale, plusieurs mouvements artistiques et architecturaux, comme le Bauhaus en Allemagne, De Stijl aux Pays-Bas, le constructivisme en URSS, critiquent le fait que l’architecture soit le plus souvent réservée à une élite. Ils réfléchissent à des constructions répondant aux besoins de tous, plus souples, plus modulables, plus ouvertes. Pour les mettre à la portée du plus grand nombre, ces constructions emploient des matériaux industriels produits en série et peu coûteux. Pour l’architecte français Le Corbusier, la maison doit devenir “une machine à habiter”.
Si elle s’en écarte par son côté artisanal et élitiste, la Maison de verre adopte certains des points considérés par ces nouveaux architectes comme signes de modernité : la “façade libre”, peau (ici de verre) indépendante de la structure, le “plan libre” (la suppression des murs porteurs donne une grande souplesse pour la structuration intérieure), fenêtres en longueur rendues possibles par le fait que les façades ne sont pas porteuses.
Une source d’inspiration
En raison du matériau utilisé, et de sa modernité, la Maison de verre fascine, et contribue à pousser plusieurs générations d’architectes sur la voie de la transparence.
En témoignent des projets ultérieurs comme la Glass House de Philip Johnson, construite en 1949 à New Canaan (Connecticut), la Farnsworth House de Ludwig Mies van der Rohe construite en 1951 à Plano dans l’Illinois, l’institut Pietro Maria Bardi (la Casa de Vidro), construit par Lina Bo Bardi en 1951 à São Paulo, ou encore les maisons de verre réalisées par Pierre Koenig en Californie.
Et plus près de nous, de nombreux édifices publics se sont inspirés de ces possibilités du verre : la pyramide du Louvre de Ieoh Ming Pei, l’institut du Monde arabe de Jean Nouvel et Architecture-Studio, la Bibliothèque nationale de France de Dominique Perrault…