Un haut lieu de la vie intellectuelle
À partir du 12e siècle, Avignon devient un centre intellectuel et artistique phare, où l’humanisme de la Renaissance est en gestation tandis que se développe une prestigieuse école de peinture. Sa situation géographique exceptionnelle, mais aussi la construction du fameux "pont d’Avignon", favorisent cette effervescence.
Une situation géographique privilégiée
La situation géographique de la ville, au carrefour de grandes routes commerciales, lui assure une grande prospérité. Cette situation est favorisée par la construction, à partir du 12e siècle, du pont Saint-Bénézet (le fameux "pont d’Avignon") qui est sans doute l’unique point de passage “en dur” du Rhône d’amont en aval. C’est un ouvrage impressionnant de 915 m de long, soutenu par 22 piles (à l’origine). Le pont est partiellement détruit par des crues successives du Rhône au 17e siècle.
Un foyer de l’humanisme
Fondée en 1303, l’université d’Avignon fait de la ville un haut lieu théologique et intellectuel. Première cour d’Europe, le palais attire de nombreux artistes et hommes de lettres. La bibliothèque du pape est l’une des plus riches au monde : environ 2 000 volumes sont conservés – à une époque où l’imprimerie n’existe pas encore et où le livre est un objet particulièrement précieux. Une partie de ces ouvrages est parvenue jusqu’à nous : après notamment avoir fait partie de la collection de Colbert, ils sont aujourd’hui dans les réserves de la Bibliothèque nationale de France. La musique joue un rôle aussi très important à Avignon : les musiciens et les compositeurs créent de nouvelles formes chantées et jouées comme l’Ars nova, qui combine poésie profane et sacrée. La présence à Avignon du poète et penseur florentin Pétrarque laisse à penser que la ville fut l’un des premiers foyers de l’humanisme naissant – courant de pensée européen qui place l’Homme au centre du monde et revendique le retour aux idéaux antiques.
L’école d’Avignon : les âges d’or de la peinture provençale
La présence des papes fait d’Avignon l’un des foyers artistiques les plus vivants du Moyen Âge. De nombreux artistes sont appelés à la cour, comme le grand peintre siennois Simone Martini qui doit réaliser à la demande de Clément XII les fresques de l’église Notre-Dame des Doms. Le règne de Clément VI est sans doute le plus fastueux : Simone Martini reste à Avignon où il réalise des tableaux, des fresques et des enluminures et enseigne l’art de peindre à plusieurs artistes. Parmi ces derniers, Matteo Giovannetti, venu également d’Italie, reçoit d’importantes commandes de fresques dans la chapelle Saint-Martial, l’oratoire Saint-Michel, la salle du consistoire et la chapelle Saint-Jean. L’esthétique et le style, dérivés de la tradition italienne, sont passablement différents des productions contemporaines gothiques – voire carrément inédits en France : le goût prononcé pour la représentation de la nature, la maîtrise de la perspective, l’apparition de véritables portraits annoncent les peintures de la Renaissance. À cette époque, les registres de l’administration papale font état d’importantes commandes de couleurs : or, carmin, vermillon, orpiment tandis que l’azur est acheté en Allemagne et à Montpellier. Le travail s’effectue toujours en équipe : les exécutions de ces peintures permettent aussi à de nombreux peintres de se former pour, à leur tour, transmettre leur savoir-faire. On assiste alors à la formation de la “première école d’Avignon” qui infléchit le style gothique et rayonne sur toute la Provence. Après ce premier âge d’or, il faut attendre la fin du Grand Schisme (1417) et le retour de la paix dans la région pour observer une nouvelle impulsion. La ville redevient un important carrefour commercial pour le sud de la France et les nombreux négociants qui s’y installent passent commande aux artistes qui renouvellent ce style original combinant les influences du nord et du sud de l’Europe. Enguerrand Quarton (Laon, 1412-Avignon, 1466) est sans doute l’un des plus beaux représentants de la “deuxième école d’Avignon”. Les œuvres – manuscrits enluminés et tableaux – qui nous sont parvenues démontrent une maîtrise des arts de la couleur et du dessin. Les compositions impressionnantes sont relevées par des tons chatoyants tandis que les paysages, dépeints avec une extrême minutie, rappellent les représentations du nord de l’Europe – même si l’on peut reconnaître au fond la silhouette de la montagne Sainte-Victoire, visible depuis Avignon.