Un puissant ventilateur

— par Félix et Louis Lazare

Publié en 1844, le Dictionnaire historique des rues et monuments de Paris fait un relevé précis des rues de Paris avant les travaux d’Haussmann. Alors que l’hygiène des villes devient une préoccupation importante, la rue de Rivoli, large et ventilée, fait figure de modèle.


“Parmi les créations dont nos souverains ont doté, depuis des siècles, la ville de Paris, la rue de Rivoli est sans contredit l’une des plus belles et des plus utiles. Cette voie splendide et magistrale, si bien placée dans le magnifique panorama de Paris, est également un puissant ventilateur qui apporte avec lui l’air et la vie. Cette artère parallèle aux quais, cette voie Napoléonienne par excellence, a redressé, détruit ou transformé dans son parcours un grand nombre de ruelles sombres, malsaines, hideuses, qui faisaient honte à Paris.
La rue de Rivoli sert en même temps de vestibule à sept monuments dont plusieurs sont les préférés dans l’admiration du monde. Ces édifices, complétés par la voie nouvelle, sont : l’église Saint-Louis-Saint-Paul, la caserne Napoléon, l’Hôtel-de-Ville, la tour Saint-Jacques-la-Boucherie, le Louvre, le Palais-Royal et les Tuileries.
Pour pratiquer cette grande trouée en plein cœur de Paris, il a fallu démolir 414 maisons et dépenser 50 millions. Mais l’État, noblement inspiré, est venu en aide à l’administration municipale. Il a pensé avec justice qu’il devait fournir son contingent dans la dépense nécessitée par une création qui n’est pas simplement une rue parisienne, mais bien une grande voie nationale complétant ou dégageant des édifices qui constituent en quelque sorte la gloire artistique de la France. L’aliénation des terrains que la voie n’a pas utilisés dans le principe a produit ou produira, avec la vente des matériaux en déduction des frais généraux, une somme de 15 millions environ. De sorte qu’on peut affirmer n’avoir jamais vu d’opération plus importante et moins coûteuse.”

Félix et Louis Lazare, Dictionnaire historique des rues et monuments de Paris, p. 676.