Les différentes citadelles de Vauban
La fortification à base de bastions est déjà très développée par les ingénieurs italiens au 16e siècle. Mais Vauban porte ce type de construction à l’une de ses apogées. Chacune de ses réalisations est différente car elle tient compte des caractéristiques du site à défendre.
À Besançon, Briançon (dans les Alpes) ou Montlouis (Pyrénées-Orientales), Vauban tire parti des collines et des montagnes environnantes comme des lignes de défense naturelle. À Saint-Martin-de-Ré, Belle-Ile-en-Mer ou Camaret-sur-Mer, l’étendue de l’océan joue en sa faveur ; il crée des observatoires permettant de voir au plus loin. Lorsqu’il a affaire à un site déjà construit et habité, il le remanie : c’est le cas de Strasbourg, de Lille et d’Arras. Si au contraire, le site est inoccupé, il crée de toutes pièces des villes comme Neuf-Brisach (Alsace), Longwy (Lorraine) ou Mont-Dauphin (Hautes-Alpes). Ces grands aménagements urbains, de la forme d’un polygone régulier, suivent tous un plan régulier en damier ceinturé de multiples lignes de front.
“Faire son pré carré”
Dans le nord-est de la France, l’instabilité des frontières convainc Vauban de créer une double ligne de villes fortifiées. Il écrit à Louis XIV : "Sérieusement, Monseigneur, le roi devrait un peu songer à faire son pré carré. Cette confusion de places amies et ennemies ne me plaît point. Vous êtes obligé d’en entretenir trois pour une. Vos peuples en sont tourmentés, vos dépenses de beaucoup augmentées et vos forces de beaucoup diminuées, et j’ajoute qu’il est presque impossible que vous les puissiez toutes mettre en état et les munir.” La première ligne est composée des forts et des places fortes de Dunkerque, Bergues, Furnes, La Kenoque, Ypres, Menin, Lille, Tournai, Condé, Valenciennes, Le Quesnoy, Maubeuge, Philippeville, Dinant, tandis qu’une deuxième ligne parallèle plus au sud-ouest est tracée par Gravelines, Saint-Omer, Aire, Béthune, Arras, Douai, Bouchain, Cambrai, Landrecies, Avesnes, Mariembourg, Rocroi, Charleville. La zone comprend certains secteurs inondables en cas d’attaque. Fermement défendue par la France, elle prend le nom de “Pré carré”. Cette expression attribuée à Vauban existe encore dans le langage courant aujourd’hui pour désigner un domaine réservé et jalousement gardé.