Paris au temps des colonnade
La mode des colonnades est lancée avec la façade orientale du Louvre de Claude Perrault. Elle est confortée par les écrits de deux théoriciens particulièrement influents au 18e siècle, les abbés Jean-Louis de Cordemoy et Marc-Antoine Laugier. Tous deux contribuent à la diffusion d’une culture rationaliste de la construction : la colonne, largement mise en évidence, s’oppose à l’illusion baroque
Un idéal gréco-gothique
Dans son Nouveau traité de toute l’architecture (1706), Cordemoy condamne sévèrement l’emploi des ordres en “bas-relief” : “Les colonnes ne sont point faites pour être renfermées dans des murailles, ou simplement adossées contre elles.” Il réclame des églises “dans le goût du Portique de l’entrée du Louvre”, qu’il considère comme “la plus belle chose au monde”. Selon lui, l’église du Val-de-Grâce est “sans contredit la mieux bâtie”, mais de simples colonnes auraient été plus pertinentes que ces “inutiles et pesantes arcades” reposant sur des
pilastres
et des
piédroits
qui obscurcissent l’espace. Combinées à la logique et la stabilité de l’architecture antique, la lumière et la hardiesse des églises gothiques incitent Cordemoy et ses contemporains à rêver d’un idéal gréco-gothique, bientôt incarné par le projet de Soufflot pour Sainte-Geneviève.
Des colonnes ; toujours des colonnes !
L’Essai sur l’architecture de Laugier (1753) accentue encore la dimension morale du discours de Cordemoy. Son impact sur le paysage parisien est tel que, dans son Tableau de Paris (1781-1790), Louis-Sébastien Mercier critique une mode qui touche désormais à la paresse : “Que le génie de nos architectes est monotone ! Comme ils vivent de copies, de répétitions éternelles ! Ils ne savent plus construire le plus petit édifice sans colonnes ; toujours des colonnes, de sorte que les monuments n’ont plus de caractères distinctifs ; ils ressemblent tous, plus ou moins, à des temples.”
D’autres édifices à colonnades à Paris
. Façade extérieure est de la cour Carrée du Louvre, 1er, Louis Le Vau, Charles Le Brun, François d’Orbay et Claude Perrault, 1667-1678 : le premier jalon d’une longue lignée de colonnades.
. Chapelle du château de Versailles, Jules Hardouin-Mansart et Robert de Cotte, 1689-1710 : les colonnes de la tribune.
. Hôtel de la Marine, place de la Concorde, 8e, Ange-Jacques Gabriel, 1766-1775 : une composition largement inspirée de la colonnade du Louvre.
. École de Chirurgie, 12, rue de l’École-de-Médecine, 6e, Jacques Gondoin, 1776-1786.