Le plafond de Chagall

Plafond de la salle par M. Lenepveu
Plafond de la salle par M. Lenepveu |

Bibliothèque nationale de France

Le plafond de Lenepveu avait une composition qui fait référence à l'esthétique de Versailles. Tout comme Louis XIV a fait naître Versailles, Napoléon III veut un édifice qui montre sa puissance. Le Palais Garnier devient finalement un symbole de fierté républicaine, notamment en servant de lieu de réception de chefs d'États étrangers.

Commandée par André Malraux, alors ministre de la Culture, et installée au plafond de la grande salle de l'Opéra en 1964, l'œuvre de Marc Chagall déclenche une violente polémique. Fallait-il masquer le plafond peint de Lenepveu, datant du 19e siècle ? Une œuvre contemporaine avait-elle sa place dans cet édifice ? Malgré ces échanges houleux, Chagall termine, à 77 ans, une œuvre qui est aussi un exploit technique. D'une superficie de 220 m2, le plafond est réalisé par morceaux, puis assemblé dans les ateliers Eiffel de Meudon.

Elle constitue un hommage aux compositeurs et œuvres majeurs de l’opéra et de la danse.

Le plafond de Marc Chagall pour l’Opéra Garnier
Le plafond de Marc Chagall pour l’Opéra Garnier |

© ADAGP pour l’œuvre, photo N. Ryser

Carmen, Orphée, Eurydice... au centre de l'œuvre :

La partie verte évoque Orphée et Eurydice de Gluck, où Eurydice tient la lyre d'Orphée pendant qu'un ange lui présente des fleurs en offrande. Dans la partie bleue, on reconnaît Fidelio de Beethoven avec l'héroïne Léonore qui s'élance vers une figure de cavalier bleu. La partie rouge illustre Carmen de Bizet dans une scène typiquement espagnole, montrant l'héroïne devant les arènes en compagnie d'un taureau musicien qui joue de la guitare. Enfin, la partie jaune semble représenter un opéra de Verdi, probablement La Traviata, avec la présence d'un jeune couple accompagné d'un personnage masculin plus âgé.

La périphérie de l'œuvre entre références à Ravel, Wagner ou Berlioz :

Chagall présente un panorama de l'art lyrique à travers une mosaïque colorée d'opéras célèbres. Dans la partie verte, Tristan et Isolde de Wagner est évoqué par un couple enlacé près de l'Arc de Triomphe illuminé de rouge passion et la place de la Concorde, tandis qu'à côté, Roméo et Juliette de Berlioz montre également des amoureux entourés par une mystérieuse tête de cheval. La partie blanche rend hommage à un opéra de Rameau avec la façade illuminée du Palais Garnier et La Danse de Carpeaux, jouxtée par une représentation de Pelléas et Mélisande de Debussy aux dominantes bleues, où Mélisande repose contre la Clytie de Walter et Bourgeois sous le regard de Pelléas à sa fenêtre.

La partie bleue illustre Boris Godounov de Moussorgski avec le tsar trônant au centre, survolé par une figure de la Renommée et la ville de Moscou. Dans la partie rouge, Daphnis et Chloé de Ravel se déploie autour d'une imposante tour Eiffel, motif cher au peintre, avec un temple à ses pieds, tandis qu'à proximité L'Oiseau de feu de Stravinski présente l'oiseau vert aux côtés du peintre lui-même, palette et pinceaux en main, entouré de musiciens, de couples et dominé par un ange musicien dont le corps se confond avec son instrument.

La partie jaune accueille Giselle d'Adam à travers la danse villageoise des paysans, puis Le Lac des cygnes de Tchaïkovski avec une femme-cygne tenant un bouquet au bord du lac. Enfin, la partie bleue claire couronne l'ensemble avec La Flûte enchantée de Mozart, où un grand ange survole la scène accompagné d'un oiseau joueur de flûte qui évoque le personnage de Papageno.