Coupe perspective d’un palais vénitien
Quel que soit son époque ou son style, le palais vénitien obéit à un modèle spécifique et immédiatement reconnaissable. Cette forme particulière s’explique à la fois par l’histoire de la ville et de ses habitants, et par les conditions imposées par le milieu naturel.
Le palais vénitien est construit par des familles qui ont fait fortune par le commerce. Souvent, leur activité s’exerce dans les murs mêmes de leur demeure. Le rez-de-chaussée est occupé par un entrepôt éclairé par des fenêtres de dimensions modestes. Mais les familles les plus fortunées peuvent aussi se faire construire un entrepôt à part.
Dans certains palais, un entresol sépare le rez-de-chaussée de l’étage noble. Il est aussi consacré aux activités commerciales.
Le premier étage abrite le grand salon (ou portego) réservé aux réceptions et aux fêtes. La façade, surtout à ce niveau, peut être ornée de motifs de marbre, ou encore de mosaïques colorées. L’étage supérieur héberge les appartements privés.
Les terrasses en bois (ou altana) sont fréquentes sur les toits d’une ville qui compte peu d’espace vert. Enfin, Les cheminées de Venise ont une forme très reconnaissable, destinée à éviter les incendies. Très hautes, elles sont surmontées d’un large cône disposé la pointe en bas. La fumée s’échappe par le bas du cône et les fragments encore incandescents se refroidissent dans le cône avant de s’échapper. Pour la même raison, les cheminées sont la plupart du temps disposées le long du toit et non au milieu.
Sur un sol gagné sur la lagune, il faut construire des édifices légers ! Plusieurs techniques sont mises en œuvre pour atteindre cet objectif. Les charpentes sont évidemment en bois, de même que certains éléments destinés à relier les murs entre eux. La brique, moins lourde que la pierre, est largement employée pour les façades, sauf la façade principale des palais, le plus souvent en marbre. Les murs sont de moins en moins épais à mesure que l’on s’élève, puisque la charge qui pèse sur eux est progressivement moins importante. De plus, les édifices vénitiens comptent rarement plus de trois étages.
Pour embellir les façades de marbre tout en les allégeant, on y perce de larges ouvertures sous forme de fenêtres doubles, triples ou quadruples, très représentatives de l’architecture vénitienne. Ces fenêtres sont très tôt revêtues de vitre, car l’île de Murano compte de nombreux ateliers de verriers produisant en grande quantité dès la fin du Moyen Âge. Enfin, le long des canaux, les palais construits côte à côte se soutiennent mutuellement, ce qui contribue encore à les renforcer.
Ces techniques ont aussi des vertus antisismiques : construits sur un sol meuble, avec des matériaux souples et légers, liés par un mortier tendre à base de chaux, les bâtiments vénitiens absorbent assez bien les mouvements du sol.
Mots-clés
© BnF
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Date
1863-1872
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Auteur(es)
Eugène Viollet-le-Duc
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Description technique
Entretiens sur l’architecture, planche 32
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Provenance
Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, V-5880
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Lien permanent
ark:/12148/mm3202020674