Poésie sur le jeu de paume

— par Monsieur Bajot

Pourquoi chauler la Paume et parler de combats ?
A des joueurs pourquoi comparer des soldats?...
Non, ne me l’ôtez point, celle image m'est chère !
Eh ! mon jeu n’est-il pas l'école de la guerre?
De cent soixante pas sa longueur se compose :
Dans un moins vaste champ, votre bras raccourci
Lancerait à regret un coup trop rétréci :
Un champ plus spacieux serait peu nécessaire;
Notre force est bornée; et, pour la satisfaire,
Il faut qu’on lui présente et qu’elle atteigne un but ;
Qu’un joueur s'encourage à son premier début.
Que de chaque côté, laissant vingt pas entre elles,
Cette largeur suffit, régnent deux parallèles,
Légers sillons tracés pour former le pourtour
De l’enceinte sacrée objet de votre amour.
De l’une à l’autre au centre établissez la ligne,
Qui séparé les camps et tour à tour désigne
Les coups qui, se portant ou dessus ou dessous,
Sont juges aussitôt ou bons ou mauvais coups.
Les postes sont marqués ; on voit six combattants,
Avec ordre rangés; trois gardent les devants,
Marchent de front, bravant le sifflement des balles ;
Au centre sont placés, cà distances égales,
Deux voltigeurs : leur bras, aussi prompt que l’éclair,
Sans attendre le bond prend la balle dans l’air;
Le coup en est plus fort, la chance plus certaine,
La balle perce et rend la résistance vaine.

M. Bajot, Poésies sur le jeu de paume, 1800