Hypothèses de construction

— par Pline l'Ancien

Il ne reste aux environs aucune trace de construction. C’est un sable fin tout autour, à grains lentiformes, et tel qu’on en voit dans la majeure partie de l’Afrique. Un difficile problème, c’est de savoir comment les matériaux ont été portés à une si grande hauteur : selon les uns, on éleva des monceaux de nitre et de sel à mesure que la construction avançait, et quand elle fut terminée, on les fit fondre en amenant les eaux du Nil. Selon d’autres, on éleva des ponts en briques faites en terre, qu’on répartit, l’édifice achevé, entre les maisons des particuliers ; car, disent-ils, le Nil n’a pu être amené là, étant beaucoup plus bas.
Dans la plus grande pyramide est un puits de quatre-vingt-six coudées ; on pense qu’il reçut l’eau du fleuve. Le moyen de mesurer la hauteur des pyramides et autres édifices semblables, fut trouvé par Thalès de Milet : il mesura l’ombre à l’heure où elle est égale aux corps. Telles sont ces merveilleuses pyramides. Et enfin, pour qu’on ne s’extasie pas sur l’opulence des rois, la plus petite, mais la plus célèbre, a été construite par une courtisane, par Rhodope. Cette femme partagea l’esclavage et la couche d’Ésope le fabuliste ; et la plus grande merveille, est qu’une courtisane ait pu, à son métier, amasser de si grandes richesses.

Histoire naturelle, Pline l'Ancien, XXXVI, 81-82 (XVII à XVIII), traduction (modifiée) E. Littré, Firmin-Didot, Paris, 1855