Comment on taille les blocs de pierre

— par Viollet-le-Duc

Toutefois les ouvriers habitués à mettre en œuvre la brique crue, le pisé et les roseaux dans leurs bâtisses, n’étaient point très habiles à tailler la pierre ; ils n’avaient encore que des outils de cuivre qui s’émoussaient promptement, bien qu’on les trempât. Pour fendre les pierres dans la carrière, ayant observé que les calcaires se présentent naturellement par lits, ils dégageaient la surface horizontale extérieure ; puis, au moyen de poinçons de cuivre, ils creusaient de distance en distance, sur une même ligne, suivant la dimension qu’ils voulaient donner au bloc à extraire, des trous oblongs étroits et de la profondeur de quatre à cinq doigts. Cela fait, ils enfonçaient dans ces trous des coins de bois bien séchés ; ils mouillaient régulièrement ces coins qui, en gonflant, faisaient fendre la pierre suivant la ligne tracée par les entailles.

À l’aide de leviers de bois durcis au feu, ils faisaient alors sortir le bloc de sa place. Ces blocs, en raison de la nature litée de la pierre, présentaient ainsi des parallélépipèdes dont ils régularisaient les faces et qu’ils assemblaient. Comme ce peuple est patient et laborieux, il parvint cependant à tailler régulièrement tous ces blocs, à les polir même à l’aide de pierres dures, à y creuser des traits, des figures ; car, de même que toute chose est réglée dans la manière de vivre sur les bords du Nil, toute construction, tout objet doit mentionner les motifs en vue desquels ces constructions ou objets ont été établis et le nom de ceux pour qui on les établit.

Viollet-le-Duc