Histoire du métier de couvreur
Le métier de couvreur existe depuis que l’homme a commencé à se bâtir un toit pour se protéger des intempéries. Mais en tant que corporation, il apparaît assez tardivement. En effet, pendant l’Antiquité et le Moyen Âge, une bonne partie des toitures sont faites de planches de bois (ou "bardeaux"). Une partie du métier reste donc fortement liée à celui des charpentiers, tandis que l’autre partie, qui réalise des couvertures recouvertes de feuilles de plomb, se confond avec les "plombiers".
À partir du 13e siècle, on distingue, pour la première fois dans les règlements des métiers, les "couvreurs" (qui assurent les travaux neufs) des "recouvreurs" (qui réparent). Mais les couvreurs demeurent dans un premier temps sous l’autorité du charpentier royal. Comme dans tous les métiers liés à la charpenterie, le nombre d’apprentis est limité à un seul, et l’apprentissage dure six ans.
Naissance d’une corporation
En 1328, les couvreurs forment enfin une corporation distincte. Mais c’est surtout à partir du 16e siècle, alors que l’usage nouveau de l’ardoise requiert une technicité spécifique, que le métier s’impose enfin. En 1566, les couvreurs obtiennent l’exclusivité de la réalisation des couvertures : les maçons ne peuvent plus désormais couvrir en tuiles et en ardoise, et les charpentiers n’ont plus le droit d’exécuter de couvertures en bardeaux. De plus, le caractère particulièrement dangereux du métier de couvreur est pris en compte. Le maître ne peut faire travailler son apprenti sur les toits avant 3 ans d’apprentissage. Le premier accès aux toits était vécu comme un réel rite de passage, non dénué de danger, et qui fait l’objet de nombreux récits, parfois dramatiques.
Les abords du chantier doivent être sécurisés. Les couvreurs au travail doivent prévenir les passants de la rue de ces risques en suspendant du haut du bâtiment une croix ornée d’un tissu de couleur vive comme signe de danger. En province, cette signalisation de danger peut être remplacée par un bâton ou une tuile. Au 19e siècle, les lieux de chantier sont parfois balisés par des mendiants contre quelques sous versés par les couvreurs.
Le poète Nicolas Boileau écrit ainsi :
"Là je trouve une croix de funeste présage
Et des couvreurs grimpés au toit d’une maison
en font pleuvoir l’ardoise à la tuile à foison."
Une œuvre signée
Lorsqu’il s’agit d’un important chantier, la tradition pour le couvreur est de signer son ouvrage. Dans son travail quotidien, il n’a recours ni au pinceau ni à la plume. Il utilise alors les outils et les matériaux dont il est familier : dans le cas de l’ardoise, il taille et assemble les pièces pour leur donner une forme précise. Souvent, les signatures reprennent les emblèmes du métier : on peut deviner le marteau de couvreur, l’essette, le compas, l’enclumette ou l’échelle sur les signatures du 16e siècle. Certains couvreurs qui savent lire indiquent même leurs initiales, comme Jehan de Varennes qui forme grâce aux silhouettes d’un toit et d’un marteau les deux premières lettres de son nom : V A.