Zoom sur le Moyen Âge

Charpentiers au travail
Charpentiers au travail | © Bibliothèque nationale de France

Le métier de charpentier existe depuis toujours, mais son savoir-faire et sa technicité s’imposent au Moyen Âge. À cette époque, les charpentiers sont partout : ils construisent aussi les maisons à pans de bois, fabriquent les échafaudages et les engins de levage qui permettent de monter les pierres en haut des chantiers.
Dans les forêts, ils abattent et équarrissent les arbres et scient les planches (c’est le "sciage de long").
Mais c’est surtout au moment de la construction des cathédrales que les maîtres charpentiers développent des techniques très spécifiques, indispensables pour concevoir les charpentes de ces édifices gigantesques.

Scène d’abattage d’arbres au 15e siècle
Scène d’abattage d’arbres au 15e siècle |

© Bibliothèque nationale de France

Une stricte répartition des tâches

Sur le chantier, la répartition des tâches est stricte : des bûcherons abattent les arbres, les ébranchent et les équarrissent. Des charretiers convoient jusqu’au chantier les grumes dans des chars attelés à quatre chevaux. Sur place, le sciage du bois d’œuvre est confié à des spécialistes, les scieurs de long. Les essentes de bois étaient le plus souvent fabriquées en forêt. Les "fendeurs d’essende" pouvaient y être installés à demeure ou bien s’y rendre lorsqu’une commande leur était passée. Le bois employé à la fabrication des essentes était surtout le chêne. Pour débiter le bois, on scie et on pratique le fendage.

Le rôle des charpentiers sur le chantier des cathédrales : à toutes les étapes

Les charpentiers jouent un rôle clé sur le chantier des cathédrales. Ils sont évidemment au centre des opérations au moment de la construction du toit, mais interviennent aussi tout au long des travaux pour construire les échafaudages, les coffrages et les engins de levage.
L’une de leurs missions les plus pointues est la conception des cintres en bois qui soutiennent les porches, les baies et les voûtes durant leur construction. Ces cintres qui reproduisent la courbure de l’arc exigent un grand savoir-faire et une précision extrême. Ils sont d’abord assemblés sur le sol où leurs dimensions sont vérifiées. On ignore s’ils sont ensuite hissés d’une pièce jusqu’à leur position ou démontés puis assemblés au niveau de la voûte en construction.
Les cintres soutiennent les pierres de la voûte jusqu’à la pose de la pierre centrale, la "clé de voûte". Ils sont ensuite retirés.

Grâce à une cognée, deux charpentiers équarrissent deux poutres posées sur la tranche, isolées du sol par des cales de bois
Charpentiers à Strasbourg | © BnF

La construction du toit

Dans les cathédrales, la charpente du toit n’est généralement pas visible de l’intérieur de l’édifice. Elle est masquée par une structure le plus souvent en pierre, la voûte. Mais le toit est construit avant la voûte, ce qui permet à la fois de solidifier la structure du bâtiment et de le protéger des intempéries.
Le toit est composé de fermes* en bois, que l’on prépare au sol en respectant les plans du maître charpentier. Ces différentes pièces sont ensuite assemblées, toujours au sol, et peuvent atteindre une hauteur de 15 m.

Pénurie de bois

L’évolution des techniques de la charpente dépend aussi de la disponibilité de sa matière première : le bois. Or, à partir du 13e siècle, le bois de construction se fait plus rare car les zones agricoles s’étendent au détriment des forêts. Au sortir du siècle, les forêts sur le territoire de la France actuelle ne couvrent plus que 13 millions d’hectares, soit 1 million de moins que de nos jours.
Les essences les plus utilisées sont alors le frêne, le noyer, le sapin, le tilleul, et surtout le chêne pour les grandes pièces de charpente.
Les arbres d’un grand âge, qui peuvent fournir des pièces de grosse section, sont moins nombreux. On apprend donc à construire aussi léger que possible. Dans son Carnet, Villard de Honnecourt donne plusieurs procédés qui répondent à ce souci d’économie du bois d’œuvre : les fermes massives des combles de charpentes classiques, espacées de 3 à 5 m, sont remplacées par des chevrons fermes. Les éléments de ces fermes légères, rapprochées de 60 à 90 cm, ont en outre l’avantage d’être plus aisément hissés depuis le sol et assemblés.