L’ambassadeur d’Henri VIII visite Fontainebleau

— par Sir Henry Wallop

L’ambassadeur d’Angleterre, Sir Henry Wallop, relate au roi Henri VIII sa visite à Fontainebleau le 17 novembre 1540, effectuée sous la conduite de François Ier

“[…] nous entrâmes dans sa chambre à coucher qui, je l’assure à Votre Majesté, est très singulière, tant par des bordures antiques [réalisées d’étoffes], que par un plafond précieux et une cheminée très bien faite. [… le] roi de France me demanda de monter sur un banc pour sentir ladite matière et étoffe […]. Lui, en bon et gracieux prince, m’aida en me poussant en avant de la main […] ; et de même pour ma descente, il m’épaula à nouveau et, de là, me conduisit dans sa galerie dont il gardait la clef sur lui comme le fait Votre Majesté ; je le lui signalai, ce dont il prit plaisir. Et ayant bien regardé ladite galerie, je la trouvai la plus magnifique que j’aie jamais vue. Le plafond au-dessus est constitué de bois de noyer, et d’une autre forme que celle à laquelle Votre Majesté est accoutumée ; il est ouvragé avec des bois de diverses couleurs, comme je l’ai rapporté plus tôt à Votre Majesté, et est partiellement doré ; le sol de la galerie est en bois, étant ouvragé dans la même manière ; ladite galerie est fermée tout autour, et finement ouvragée dans les trois de ses parties ; la quatrième partie est entièrement composée d’antiques de cette estoffe que Modon fait pour les cheminées de Votre Majesté ; et entre chaque fenêtre se tiennent de grands personnages entiers à l’antique, et dans divers endroits de la galerie sont installés beaucoup de beaux tableaux d’histoire très finement travaillés […].
De là il me conduisit à son logis sous ladite galerie, aussi bien pour le voir que pour examiner les bains et étuves ; nous trouvâmes Madame d’Étampes et Madame d’Aubigné dans une chambre à côté, où il y avait deux lits : et dans mon opinion, on les rencontre plus souvent dans lesdits bains que couchées auprès de leurs maris. […] Et de là, le roi me conduisit aux dits bains, qui étaient chauds et fumaient tellement, comme s’il y avait du brouillard, que le roi me précéda pour me guider. Après il entra dans l’étuve, qui est aussi bien conçue pour ce besoin qu’il est possible ; le bain est fait comme une piscine fermée par une barrière qui laisse seulement le passage à une personne pour entrer de côté, où je pense qu’ils étaient ce matin.
Le roi de France, retournant par lesdites chambres, se rendit tout droit à la messe […].”

Sir Henry Wallop, Courrier diplomatique au roi Henri VIII, 17 novembre 1 540. Extrait de Solnon Jean-François (sous la direction de), Sources d’histoire de la France Moderne, Larousse, 1 994, pp. 126-127.