La société féodale au Moyen Âge

Suzerain et vassal
Les châteaux à motte sont contemporains de l’avènement d’une nouvelle dynastie royale : les Capétiens (987-1328), qui succèdent aux Carolingiens. Cette période correspond à un affaiblissement du pouvoir royal au profit d’une société féodale.
Alors qu’autour de l’An Mil les invasions des Vikings, des Sarrasins ou des Normands menacent le pays, les seigneurs les plus puissants, les suzerains, s’entourent de seigneurs alliés, leurs vassaux. Ces derniers s’engagent à les servir et à leur rester fidèles en cas de conflit. En échange, le seigneur assure leur protection et leur lègue une terre (un fief).
Chaque seigneur protège son domaine en construisant son propre château. Le territoire se couvre d’un maillage serré de bâtiments fortifiés qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours.
© BnF
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L’avènement des Capétiens sur le trône de France, en 987, va de pair avec de grands bouleversements au sein de la société médiévale. Le système féodal s’impose, favorisant le développement d’une société très hiérarchisée.
La mise en place du système féodal aux 11e et 12e siècles
La dissolution de l’autorité royale depuis Charlemagne, aggravée par les dernières grandes invasions (les musulmans, les Normands – hommes du Nord – et les Hongrois), accroît les pouvoirs régionaux des comtés. L’instauration de la dynastie des Capétiens, en 987, accélère le démantèlement du royaume et, à partir de 1030, le système féodal se met en place.
La seigneurie rurale, composée de centaines de châtellenies, s’approprie la puissance publique. Les seigneurs sont assujettis les uns aux autres dans une pyramide de liens de fidélité. En pratique, le vassal accepte des obligations d’obéissance et de service (aide militaire et financière) envers le seigneur qui le protège et reçoit en échange la possession héréditaire d’un fief ou d’une rente (à partir du 13e siècle).
Les trois états de la société

La rue marchande au début du 16e siècle
Entre le 13e et le 15e siècle, les villes jouent un rôle économique déterminant. Un type de maison particulier s’y développe : les maisons de marchands. Hautes et étroites, serrées les unes contre les autres, ces maisons ont une boutique au rez-de-chaussée, des logements en étages et des caves sur un ou plusieurs niveaux. La technique de construction la plus fréquemment utilisée est le pan de bois.
Les immeubles marchands sont généralement situés sur la place du marché ou la halle, non loin de l’église ou de la cathédrale. La rue marchande comprend de nombreuses boutiques.
© Bibliothèque nationale de France
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La société se segmente progressivement entre les "pauvres" (les désarmés, sans défense) et les "puissants" (ceux qui portent les armes). La théorie des ordines, soutenue par l’Église, vient conforter cette nouvelle répartition sociale. La société s’articule dès lors autour de trois ordres : ceux qui prient (les moines, les prêtres), ceux qui combattent (l’aristocratie, à peine 1 à 2 % de la population) et ceux qui travaillent (l’immense majorité, les paysans), selon un schéma social que l’on considère alors comme voulu par Dieu.
Dans cette vision de la société, la chevalerie devient un groupe cohérent et le chevalier acquiert un prestige d’autant plus grand que l’Église idéalise le rôle du combattant œuvrant pour instaurer la paix de Dieu. Au 12e siècle, avec l’essor des villes et du commerce, ce schéma tripartite se fait plus complexe : les artisans et surtout les marchands deviennent des acteurs essentiels de la vie médiévale ; la puissance seigneuriale s’affaiblit ; la chevalerie tend à disparaître et n’est plus, au 15e siècle, que l’occasion de beaux tournois et de magnifiques passes d’armes.

Le clergé, la noblesse et les travailleurs
La fin du 10e siècle est marquée par un changement politique en France : la dynastie carolingienne fait place à celle des capétiens, ce qui a des conséquences sur la société tout entière, car la place et le pouvoir du roi évoluent.
C’est dans ce contexte que l’évêque de Laon, Adalbéron, compose son Poème au roi Robert dans lequel il développe l’idée d’une société composée de trois ordres distincts. Le premier est composé du clergé, ceux qui prient. Il se divise en deux : le clergé régulier, les moines qui vivent dans des abbayes, coupés de la société, et le clergé séculier, qui vit dans la société, comme les prêtres et les clercs.
Viennent ensuite les guerriers, l’aristocratie. Leurs revenus leur permettent de se consacrer à l’art de la guerre, et leur mission dans la société est de protéger le reste de la population.
Enfin, les travailleurs forment la base de la société. Ce tiers état, plus nombreux et plus hétérogène, regroupe les artisans, les paysans et les marchands.
Cette tripartition place l’aristocratie et le clergé en haut de la société et légitime l’asservissement d’une partie de la population. Ce mode de répartition, déjà présent dans l’Antiquité, reste quasiment inchangé jusqu’à la Révolution française.
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Une multitude de châteaux

Le moulin à vent
Le moulin à vent fait son apparition au 7e siècle sur les plateaux iraniens. À l’époque, il ne possède pas encore les grandes ailes qu’on lui connaît aujourd’hui. Il s’agit d’une haute tour comportant des meurtrières par lesquelles le vent s’engouffre. Ainsi canalisé, le vent entraîne une roue à palettes située au sommet de l’édifice. Cette roue actionne une meule, c’est-à-dire une grosse pierre plate qui frotte contre une pierre fixe, et moud le grain.
On attribue l’arrivée du moulin à vent en Occident aux Arabes, qui conquièrent à l’est l’actuel Iran, et à l’ouest le Maghreb et la péninsule ibérique. La première mention d’un moulin à vent en Occident date de 833.
Jusqu’au 12e siècle, le moulin à vent est surtout utilisé sur les côtes venteuses de la Normandie et de l’Angleterre, les autres régions restant fidèles au moulin à eau. Mais au 13e siècle, il se diffuse dans toute la France. Sa physionomie change : des ailes recouvertes de voiles captent beaucoup mieux la force du vent.
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Parallèlement, la noblesse se constitue en groupe fermé, regroupant aussi bien de pauvres que de puissants châtelains. Elle assume la gestion du territoire et l’administration des hommes. Le territoire est quadrillé par un maillage serré de châteaux qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours où nul ne réside sinon temporairement, pour percevoir les impôts, ou bien des "maisons fortes", résidences nobiliaires parfois à peine fortifiées. Le pays est divisé en châtellenies, regroupant chacune de 5 à 20 villages ; à leur tête se trouve un seigneur châtelain, qui rend la justice (sauf en cas de crime de sang, où seul le roi, ou ses représentants, peut légiférer). Il s’agit d’une organisation à échelle humaine. Le seigneur entretient le plus souvent avec ses paysans des relations de confiance ; il n’est pas rare qu’il devienne le parrain de petits paysans.

Une multitude de châteaux
L’instauration de la dynastie des Capétiens, en 987, accélère le démantèlement du royaume et, à partir de 1 030, le système féodal se met en place.
La seigneurie rurale, composée de centaines de châtellenies, s’approprie la puissance publique. La noblesse, regroupant aussi bien de pauvres que de puissants châtelains, assume la gestion du territoire et l’administration des hommes. Le territoire est quadrillé par un maillage serré de châteaux qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours où nul ne réside sinon temporairement, pour percevoir les impôts, ou bien des "maisons fortes", résidences nobiliaires parfois à peine fortifiées.

Une multitude de châteaux
L’instauration de la dynastie des Capétiens, en 987, accélère le démantèlement du royaume et, à partir de 1 030, le système féodal se met en place.
La seigneurie rurale, composée de centaines de châtellenies, s’approprie la puissance publique. La noblesse, regroupant aussi bien de pauvres que de puissants châtelains, assume la gestion du territoire et l’administration des hommes. Le territoire est quadrillé par un maillage serré de châteaux qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours où nul ne réside sinon temporairement, pour percevoir les impôts, ou bien des "maisons fortes", résidences nobiliaires parfois à peine fortifiées.

Un château sur motte
L’espace circonscrit par le fossé abritait la basse cour, où l’on édifiait en général le logis du châtelain et la chapelle castrale. Un second fossé entourait un espace plus large, rectangulaire, où ont pu à l’origine prendre place des maisons villageoises, avant que n’y soient plantés les jardins à la française. Une église paroissiale demeure d’ailleurs de cette installation. Une grande route longe le domaine, sillonnée de passants et de caravanes de mulets. À l’emplacement où devait se dresser, au XIIe siècle, le châtelet d’entrée, un bâtiment (un moulin ? ) se dresse, commandant une voie d’eau et une mare, qui fait vraisemblablement fonction de vivier. À gauche, vers des bâtiments castraux aux toits pointus qui paraissent dater de la fin du XVe siècle, est la réserve de chasse, entourée d’un mur.

Castel del Monte dans les Pouilles (Italie)
Ces évolutions permettent de construire des châteaux plus solides. Mais les constructeurs désirent aussi donner au château une forme parfaite, symbole de la puissance du roi ou du seigneur.
En Italie, dans les Pouilles, Castel del Monte est construit en 1230 pour l’empereur Frédéric II. Son plan tout entier repose sur le chiffre 8 : c’est un octogone parfait, flanqué de huit tours elles-mêmes octogonales. La cour centrale forme elle aussi un octogone régulier.
Dans ce cadre économique et politique, les ressources naturelles sont mises à disposition des habitants, moyennant impôts. La nature est systématiquement exploitée : les forêts sont mises en coupe, les cours d’eau canalisés sont scandés à intervalles réguliers de biefs et de moulins, le sommet des collines est surmonté de moulins à vent, le réseau routier, emprunté par d’innombrables voyageurs, marchands et pèlerins, se développe. La seigneurie banale se met en place dès le 11e siècle. Elle tire son nom du "ban", ancien pouvoir royal de commander et de punir, dont s’empare progressivement jusqu’au moindre seigneur. Ce pouvoir contraignant est caractérisé par la mainmise sur les hommes, sur l’espace et sur les moyens de production, comme en témoignent les "banalités", ces redevances exigées en échange de l’usage du pressoir, du four et du moulin. En effet, la construction et l’entretien de ces outils performants mais hors de prix sont assurés par le seigneur qui en fait payer l’usage.
Le rôle de l’église

Une multitude de châteaux
L’instauration de la dynastie des Capétiens, en 987, accélère le démantèlement du royaume et, à partir de 1 030, le système féodal se met en place.
La seigneurie rurale, composée de centaines de châtellenies, s’approprie la puissance publique. La noblesse, regroupant aussi bien de pauvres que de puissants châtelains, assume la gestion du territoire et l’administration des hommes. Le territoire est quadrillé par un maillage serré de châteaux qui se dressent tous les 3 ou 4 km. Certains sont imposants, d’autres ne sont que de simples tours où nul ne réside sinon temporairement, pour percevoir les impôts, ou bien des "maisons fortes", résidences nobiliaires parfois à peine fortifiées.
Cette société recherche avant tout l’ordre, la sécurité et la paix. Elle abrite hommes et biens derrière les fortifications des villes et des villages, même si, inévitablement, des guerres viennent perturber l’état idéal du "bon gouvernement" que tout roi digne de ce nom cherche à assurer à ses sujets. Ce souci coïncide avec celui de l’Église qui tente, depuis les temps carolingiens, de brider la violence des guerriers et d’instaurer une morale militaire qui protège les femmes, les enfants et les outils de travail. À ce maillage laïque, à la fois économique et politique, s’ajoute celui de l’Église qui, vers les 11e-12e siècles, achève d’instaurer le système des paroisses en proposant aux fidèles ses églises, ses fonts baptismaux et ses cimetières. Chapelles, croix de carrefours, croix de chemins ponctuent le paysage. La religion imprègne toute la vie publique ou privée, des nobles aux pauvres gens. La prière s’impose jusque dans les actes les plus humbles de la vie quotidienne. La vie est rythmée par la cloche de l’église. En ville, elle le sera bientôt par celle des beffrois quand le "temps des marchands" (J. Le Goff) viendra se surimposer au temps divin.