Toujours plus haut !

Lion de la porte d’Ishtar
La forme la plus ancienne d’écriture apparaît en Mésopotamie, dans la région du croissant fertile entre le Tigre et l’Euphrate (Irak actuel) vers 3300 avant J.-C. Cette région voit aussi la naissance d’une des plus grandes et brillantes cités de l’Antiquité : Babylone, vers 2000 avant J.-C.
Le premier empire babylonien est fondé par des populations d’Arabie septentrionale, les Amorrites. Son sixième roi, Hammourabi, laisse un célèbre texte juridique gravé sur une stèle de basalte, le code d’Hammourabi qui se trouve aujourd’hui au Louvre.
Après des siècles au cours desquels la ville connaît diverses invasions, Babylone vit à partir du 7e siècle avant J.-C. une période d’expansion. Le roi Nabuchodonosor II est l’artisan de ce renouveau et de la splendeur de la ville. Il fait construire les magnifiques jardins suspendus, que les grecs classent parmi les 7 merveilles du monde. Il entoure la ville de remparts, édifie cent portes monumentales en briques bleues vernissées, et restaure la mythique tour de Babel.
La grandeur de la cité ne survit pas longtemps à Nabuchodonosor. Après sa mort, l’invasion de la Mésopotamie en -539 par Cyrus le Grand, roi des Perses, signe la fin de l’empire babylonien.
La ziggurat de Babylone donne naissance au mythe de la tour de Babel, symbole de la volonté des hommes d’égaler les dieux… ou de se dépasser eux-mêmes ?
La ziggurat de Babylone, ou Etemenanki, a sans doute été construite au début du 2e millénaire par l’un des rois les plus puissants de la Mésopotamie, le roi Hammourabi, sixième roi de Babylone (1792-1750 avant J.-C.). Elle a ensuite été restaurée et remaniée par Nabuchodonosor II (604-562 avant J.-C.) qui l’aurait fait recouvrir de briques vernissées colorées. Des textes gravés sur pierre témoignent de ces travaux.
Un historien grec, Hérodote, la décrit en ces termes (il parle de huit niveaux alors que la plupart des images en montrent sept) : « Au milieu se dresse une tour massive, longue et large d’un stade, surmontée d’une autre tour qui en supporte une troisième, et ainsi de suite, jusqu’à huit tours. Une rampe extérieure monte en spirale jusqu’à la dernière tour. »
Située au centre de Babylone, sur la rive de l’Euphrate, la tour appartenait à un vaste domaine sacré et supportait le « temple haut ». Dans la même enceinte se trouvait aussi le “temple bas”. Les palais et les jardins du roi et de sa famille s’étendaient plus au nord sur la même rive.

La ziggurat de Babylone de nuit dans les aventures d’Alix
La ziggurat de Babylone, ou Etemenanki, a sans doute été construite au début du 2e millénaire par l’un des rois les plus puissants de la Mésopotamie, le roi Hammourabi, sixième roi de Babylone (1792-1750 avant J.-C.). Elle a ensuite été restaurée et remaniée par Nabuchodonosor II (604-562 avant J.-C.) qui l’aurait fait recouvrir de briques vernissées colorées. Des textes gravés sur pierre témoignent de ces travaux.
Un historien grec, Hérodote, la décrit en ces termes (il parle de huit niveaux alors que la plupart des images en montrent sept) : "Au milieu se dresse une tour massive, longue et large d’un stade, surmontée d’une autre tour qui en supporte une troisième, et ainsi de suite, jusqu’à huit tours. Une rampe extérieure monte en spirale jusqu’à la dernière tour."
Située au centre de Babylone, sur la rive de l’Euphrate, la tour appartenait à un vaste domaine sacré et supportait le “temple haut”. Dans la même enceinte se trouvait aussi le “temple bas”. Les palais et les jardins du roi et de sa famille s’étendaient plus au nord sur la même rive.
Extrait de La Tour de Babel © Casterman. Avec l’aimable autorisation des auteurs et des Éditions Casterman
Extrait de La Tour de Babel © Casterman. Avec l’aimable autorisation des auteurs et des Éditions Casterman

Vue de Babylone et de la ziggurat
Sur cette image du 17e siècle, Athanasius Kircher représente la ville de Babylone dominée par la célèbre ziggurat. La disposition des lieux reflète celle des villes mésopotamiennes, partagée en deux entre l’enceinte sacrée (à droite avec la ziggurat et le temple qui émergent), et les quartiers du roi avec le palais et les jardins suspendus représentés par une construction en escalier.
© Bibliothèque nationale de France
© Bibliothèque nationale de France
Condamnation de la démesure ?
Dans la Genèse, on assiste avec l’épisode de la tour de Babel à la dispersion des hommes sur terre, et à l’obligation qui leur est faite de parler des langues différentes, au risque de ne plus se comprendre. Dieu condamne les hommes pour leur orgueil et les oblige à abandonner une entreprise dans laquelle, tous ensemble, ils espéraient se dépasser (et surtout le dépasser !).
La tradition chrétienne interprète l’épisode comme la condamnation de Babylone, ville de démesure et de luxure, persécutrice du peuple hébreu puisque Nabuchodonosor II met Jérusalem à sac au 5e siècle avant J.-C., et ordonne l’exil des Hébreux. Par extension, elle y voit aussi la condamnation future de Rome, cité où furent persécutés les premiers chrétiens. L’iconographie du Moyen Âge compte autant de représentations de la construction de la tour de Babel que de destruction par le feu de Babylone.
Ou dépassement ?

La mosquée de Samarra
Les ziggurats sont de base carrée ou rectangulaire. Pourtant, la peinture occidentale représente souvent la tour de Babel sous forme d’un édifice à base circulaire, avec une rampe en spirale. La mosquée de Samarra, qui se trouve aujourd’hui en Irak, a probablement inspiré les représentations de la tour de Babel. Elle est construite au 9e siècle sur les bords du Tigre. Haut de 54 m, son minaret de brique constitué d’une rampe en spirale représente un exploit architectural.
© Jean-Jacques Gelbart, avec l’aimable autorisation des Editions Gelbart
© Jean-Jacques Gelbart, avec l’aimable autorisation des Editions Gelbart
Mais construire toujours plus haut est une entreprise universelle qui peut être diversement interprétée. Le projet peut être signe d’orgueil et de démesure humaine. Il peut aussi témoigner de la ferveur des hommes. Les flèches des cathédrales gothiques s’élancent vers le ciel, non pas pour célébrer les hommes mais pour se tourner vers Dieu.
À la Renaissance, la dispersion obligée des hommes après l’abandon du chantier de la tour de Babel prend un autre sens. Dans un monde bouleversé par les grandes découvertes, les frontières sont repoussées, ouvrant aux hommes de nouveaux espaces à découvrir. L’humanisme affirme alors sa confiance dans les réalisations de l’homme. Ce dernier ne se préoccupe plus d’égaler Dieu, mais plutôt de développer son savoir et ses compétences dans de nouveaux domaines.
Dans ce contexte, le chantier de la tour devient aussi un hymne aux capacités de l’homme à fabriquer et innover. D’ailleurs, le tableau de Pieter Brueghel l’Ancien ne rend-il pas aussi hommage au savoir-faire des constructeurs ?
Quant à la condamnation au multilinguisme, en est-elle vraiment une, finalement ? La variété des langues humaines est évidemment une richesse Même si la nostalgie d’une langue universelle a donné naissance en 1887 à l’espéranto, langue internationale construite de toutes pièces, et dont le symbole est… une tour de Babel !