L'effet du vent

— par Ken Follett

"Il continua jusqu'au toit. On avait posé toutes les feuilles de plomb et il constata que le clocheton qui bloquait l'écoulement de l'eau de pluie comportait maintenant une large gouttière à sa base. Il y avait du vent là-haut et il devait se cramponner quand il s'approchait du bord : il ne serait pas le premier bâtisseur à tomber d'un toit sous l'effet d'une rafale de vent, bien plus fort en haut qu'au niveau du sol. La force du vent paraissait augmenter de façon disproportionnée à mesure qu'on montait…
Il s'arrêta, le regard perdu dans le vide. La force du vent augmentait de façon disproportionnée à mesure qu'on montait. C'était là la réponse à la question qui le harcelait. Ce n'était pas le poids de sa voûte qui provoquait les fissures : c'était la hauteur. Il avait bâti l'église assez solidement pour soutenir la masse, il en était sûr ; mais il n'avait pas pensé au vent. Les murs très hauts étaient constamment soumis à ses assauts qui finissaient par provoquer des fissures. Debout sur le toit, fouetté par les bourrasques, Jack s'imaginait sans mal l'effet que produisaient les mêmes attaques sur la structure de pierre. Il connaissait le bâtiment si bien qu'il éprouvait la même tension que si les murs faisaient partie de son corps. Le vent poussait de côté contre l'église, de la même manière qu'il le poussait lui-même. Et, comme l'église ne pouvait se pencher, elle se fissurait."

Les Piliers de la Terre, Ken Follett, 1989