Les perspectives

L'architecture civile : la Bibliothèque
Depuis 1724, la Bibliothèque royale était établie dans l’hôtel de Nevers qui occupait l’aile occidentale du palais Mazarin. Le lieu, conçu pour l’habitation, se prêtait mal aux besoins d’une grande bibliothèque car il y manquait une grande salle de lecture. Consulté en 1785, Boullée propose une solution ingénieuse et simple : "C’est tout uniment de couvrir la cour de l’ancien palais Mazarin qui est immense, d’en disposer la décoration intérieure de manière qu’elle présente un superbe amphithéâtre de livres et de réserver les bâtiments actuels comme dépôts des manuscrits, des estampes, des médailles, de la géographie et autre."
À la différence d’autres grandes commandes publiques, le projet d’agrandissement de la Bibliothèque royale fut presque sur le point d’aboutir. Retardé, puis oublié lors de l’épisode révolutionnaire, il réapparut finalement sous une forme nouvelle au siècle suivant quand Labrouste créa sa grande salle de lecture sur une partie de l’ancienne cour du palais Mazarin.
Bibliothèque nationale de France
Bibliothèque nationale de France
Les vues en perspectives permettent de bien appréhender la complexité d’un bâtiment. Aujourd’hui, les outils logiciels permettent de visualiser des maquettes en trois dimensions.
La salle de lecture apparaît couverte par une vaste voûte à caissons percée en son centre par une ouverture. Boullée a transposé, sur un plan rectangulaire, la voûte prestigieuse du Panthéon de Rome. L’éclairage par le plafond libère les murs latéraux pour le rangement des livres. Ce percement de la voûte est peu réaliste, même si Boulée a assuré qu’on pourrait obtenir "une voûte d’une étendue encore plus considérable".
Environ 300 000 volumes sont disposés en libre accès sur des rayonnages, dans les contremarches des gradins et derrière les colonnades. Les ouvrages peuvent ainsi circuler rapidement d’un niveau à l’autre.
L’architecte a introduit dans son tableau un collège de savants et de philosophes drapés à l’antique comme dans la fameuse composition de Raphaël intitulée L’école d’Athènes.
Ce projet qui semble utopique réapparaîtra au siècle suivant, quand Labrouste créera sa grande salle de lecture à l’emplacement même qu’avait imaginé Boullée.